LA VOIE ROMAINE A MARQUIXANES
La voie romaine passant à Marquixanes est appelée la via Conflentana
En 1176, Guillemus de Eus donne à St Martin du Canigou « …1 condaminam et unum ferragenale in terminis ville Marchexanis…Est autem dicta condamina subtus villam Marchexanis ex parte aquilonis inter stratam publicam et flumen Thed; ferragenale est inter stratam publicam et viam qua in villa Marchexanis introitur et egreditur ex parte Rosselioni… »
La voie passait donc entre le village de Marquixanes et la Tet.
Extrait (p 138) de Comps 2002 : COMPS (J.-P.). — Stratae et Stradae, les grands axes de circulation des Pyrénées-Orientales dans les textes médiévaux. Domitia, 3, Revue du Centre de Recherches Historiques sur les Sociétés Méditerranéennes, Université de Perpignan, 2002, p. 127-155.
LA VIA CONFLENTANA
D’après la conférence de Mr J.P. COMPS le 20/9/2008 à VINCA
Cette voie très modeste, n’a rien des larges allées pavées ou empierrées qu’on imagine, il s’agit d’aménagements modestes d’Elne à la Cerdagne (Col de la Perche) ; d’après les précisions obtenues à partir des textes qui datent, pour les premiers, du IXème siècle (époque carolingienne), car il n’existe pas de textes antérieurs.
Le départ est d’Elne, qui a connu deux périodes de prospérité, la période préromaine (époque ibère) puis, après un bref déclin, la période du Bas-Empire, ce qui explique la création d’un évêché. On peur penser que la voie existe déjà à l’époque ibère.
Au fil du temps, ce tracé s’est enrichi de fortifications, de chapelles, etc.… tout le long, même si beaucoup de ces édifices ont disparu.
Les difficultés du tracé
– Le relief ; puisqu’il s’agissait de créer un accès à la Cerdagne et qu’on est confronté à la montagne avec au départ un niveau proche de 0 et à l’arrivée 1500 m d’altitude (surtout après Villefranche)
– Les cours d’eaux ; puisqu’il fallait franchir le Réart, la Canterrane, le Boulès, la Têt avec des gorges ou des ponts
C’est donc devenu une route carrossable très tardivement.
1.Elne-Thuir
Tronçon peu connu car mal conservé, qui passait à l’époque par Villasèque et non pas Bages qui n’existait pas comme tel.
2.Thuir-Rigarda
Suit la départementale mais évite Bouleternère, car le tracé passait plus au Nord.
Quand Perpignan se développe au Moyen Age, une bretelle qui partait de Sant Féliu d’Avall venait rejoindre la route du Conflent à Corbére les Cabanes.
Fin XIVème, la chapelle Ste Anne est érigée par les habitants de Boule pour sacraliser le lieu qui a été souillé par les exactions commises au col de Ternère.
Juste avant la Révolution française, la route nationale est créée et l’ancien col très étroit et « coupe-gorge » bien que protégé par le château est remplacé par le nouveau col (toujours actuel).
Vinça était évité, on empruntait le chemin de la « Motzane » puis franchissement à gué du ruisseau de Rigarda en face de l’ancienne église de Villela (transfert au XVIème de cette église à celle actuelle au centre du village).
Puis le chemin suivait la limite de la commune de Vinça et Joch puis vers la Lentilla.
Captures
Les villages capturent la voie : Détournement par Vinça qui a grandi et tire la route fin XIIème début XIIIème.
Puis Bouleternère fin XVIème : Philippe II leur a accordé le détournement au terme d’un procès et la route rejoint la Chapelle Ste Anne.
Ille ne sera desservie qu’à la Révolution.
3.Rigarda à Olette
Après la Lentilla, le tracé est plus flou.
On ne retrouve que des limites de propriétés. Les constructions de la R.N. et voie ferrée ont beaucoup détruit.
Avant Prades, un oratoire est dédié à St Jacques (possible lien avec les chemins de Compostelle ? Où l’on faisait des pèlerinages par temps d’épidémies de peste : Perpignan -Via Conflentana – Lleida – St Jacques).
Entre Codalet et Villefranche, on ne sait si elle empruntait la rive droite ou la rive gauche.
Villefranche a été créée par les comtes de Cerdagne à la fin du XIème siècle.
L’emplacement a été choisi pour son intérêt stratégique, la ville barrait la voie du Conflent mais aussi le passage vers l’Espagne par la col de Jou, la Pla Gullem, et le col de Porteil.
Puis le chemin suit la rive droite jusqu’à Serdinya, ensuite, doute entre Serdinya et Joncet ( droite ou gauche ?)
La Bastide d’Olette a été construite au XIVème par le vicomte de Conflent (d’Evol), il reste deux tours de fortifications sur la via Conflentana.
Puis on atteint Olette par la gauche.
4.Olette au Col de la Perche
La pente est très rude : deux possibilités
– suivre la Têt (au fonds des gorges)
– prendre la montagne (chemin des Llansades)
Pour amener les canons depuis Perpignan jusqu’à Mont-Louis, sous Louis XIV, c’est le chemin es Llansades qui a été choisi, on a mis 21 jours pour faire Perpignan – Olette, 7 jours pour faire Olette -Mont Louis.
En temps normal, on empruntait la vallée de la Têt malgré ses difficultés, parmi lesquelles l’endroit dit « les Graus de Canaveilles » en amont d’Olette.
Le défilé était gardé par deux châteaux, Niobols et Cerola (rive gauche) et une tour, la tour de Niobols (rive droite), tous détruits par Vauban (fortifier certains points et détruire les autres pour que l’ennemi ne s’y abrite pas).
Sur la rive gauche, l’église St Pierre de Cerola bâtie par les moines de St André d’Eixalada qui était installée en face sur la rive droite (chassés par une inondation, les moines ont fondé St Germain, près de Codalet, qui est devenu ensuite St Michel de Cuixa).
A partir de Fontpédrouse, montée très rude, passage à la Cassagne et enfin Col de La Perche.
CONCLUSION
Du Col de Ternère à Villefranche, le voyageur suit une « route » escarpée et est exposé à la chute dans les ravins, les éboulements, le transport est à dos de mulet ou à dos d’homme exclusivement.
L’ingénieur Duclos, en 1779, décrit la voie du Conflent comme un sentier de montagne accidenté (un chemin de bât).
Souvent la route était en si mauvais état que les gens passaient sur les terrains adjacents.
OBSTACLES
Les péages :
Par exemple au XVIIIème siècle,
– dans le périmètre Boule – Ille – St Feliu d’Avall : paiement de la leude à la famille de Blanès
– ensuite leude du Conflent
– à Villefranche, la barre (à l’origine pour l’entretien du chemin)
– nouvelle leude avant d’entrer en Cerdagne.
Souvent, on passait à côté pour éviter de payer les péages (déviations).
Insécurité :
– les catalans étaient souvent armés et faisaient fréquemment de la contrebande (ils avaient l’appui des consuls contre les douaniers, parfois ils étaient même à la solde de personnages importants).
– les bandoliers : troupes comme les Nyeros (à la solde du Baron de Nyers) et les Cadells, hommes de main de seigneurs locaux qui commettaient des exactions au
XVIème siècle.
(le Baron de Nyers avaient 700 bandoliers à ses ordres lorsque fut entrepris contre lui le siège du château de Nyers et de la Bastide d’Olette).
– les guerres très fréquentes (zones frontalières) et les guerres de religion (comme Vinça attaqué par les Huguenots au XVIème)
Malgré tout, le chemin était très fréquenté car il y avait beaucoup de marchandises à transporter (bois, fer, bêtes, etc.…).
LE DESENCLAVEMENT
Il fut lent et progressif. En 1851, ouverture de la route vers la Cerdagne et ensuite le chemin de fer.
A la fin du Xème siècle, le doge de Venise est venu s’installer comme moine à St Michel de Cuixa, et, 10 ans plus tard, le Comte Oliba-Cabreta est parti par cette même voie, avec toutes ses mules chargées de richesses vers le monastère du Mont-Cassin en Italie : La Via Conflentana n’a rien de spectaculaire mais elle est chargée d’Histoire.
LE TRACE DE LA VOIE ROMAINE AUX ALENTOURS DE MARQUIXANES
un essai de tracé sur une carte en fonction des textes de JP COMPS aux alentours de MARQUIXANES ICI
En venant de CORBERES LES CABANES jusqu’au col de Conjourdou,(à droite de la carte ) puis La Llentilla….
devant le mas de La Llorda subsisterait un chemin bordé d’un mur, chemin coupé maintenant par la RN 116.
….passage au nord de Marquixanes entre la TET ( compte tenu de l’encaissement, le lit de la rivière pouvait etre au même emplacement ) et les rochers sous le premier rang de fortifications;
à la cote 289 sur l’actuelle RN 116 , la côte porte un nom « les cabanes » pouvant rappeler un relais du même type que celui de CORBERES LES CABANES;
NB : le cami réal dont le tracé emprunte des ruelles traversant le village est souvent confondu dans les esprits, mais il est plus récent et fera l’objet d’un développement particulier.
VERS LA PAGE DES GUIDES TOURISTIQUES
Revenir sur la synthèse du patrimoine de Marquixanes